Bagatelles

Bagatelles

Robert Desnos (1900-45)

Bagatelles
Vous reviendrez me voir, dit-elle Quand vous serez riche à millions Quand les roses de Bagatelle, Sous la neige s’épanouiront. Lavant le sable des rivières, Brisant le quartz, ouvrant le tronc Des caoutchoucs à la lisière D’un enfer d’arbres aux fûts ronds, Libérant des nids de pétrole, Ou labourant les Alaskas, Quatre-vingts ans, la terre molle Cacha le trésor des Incas. Quand il revint, elle était morte, Il était bête, il était vieux, Mais les amants de cette sorte Ne sont pas tellement nombreux. Que fleurissent à Bagatelle Les roses de poudre et frimas, Mais que fleurissent surtout celles Que l’on aime jusqu’au trépas.
Bagatelles
You’ll come back to me, she said, Rich as Croesus, when the rose Down at Bagatelle shall spread Buds and blossoms in the snows. Washing loads of river-sand, Breaking quartz to smithereens Tapping rubber from a stand Of infernal round-boled trees Freeing up the beds of oil Heavy work in the Alaskas Eighty years in yielding soil Hidden treasure of the Incas He came back but she’d passed over. He was old and cretinous. Even so, this type of lover, They are hardly numerous. May there bloom at Bagatelle Roses of the snow and frost May those darlings bloom as well That we love till life is lost.

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

Ballad of Fantomas

Complainte de Fantômas

Robert Desnos (1900-45)

Complainte de Fantômas
Écoutez, ... Faites silence La triste énumération De tous les forfaits sans nom, Des tortures, des violences Toujours impunis, hélas! Du criminel Fantômas. Lady Beltham, sa maîtresse, Le vit tuer son mari Car il les avait surpris Au milieu de leurs caresses. Il coula le paquebot Lancaster au fond des flots. Cent personnes il assassine Mais Juve aidé de Fandor Va lui faire subir son sort Enfin sur la guillotine... Mais un acteur, très bien grimé, À sa place est exécuté. Un phare dans la tempête Croule, et les pauvres bateaux Font naufrage au fond de l’eau. Mais surgissent quatre têtes: Lady Beltham aux yeux d’or, Fantômas, Juve et Fandor. Le monstre avait une fille Aussi jolie qu’une fleur. La douce Hélène au grand cœur Ne tenait pas de sa famille, Car elle sauva Fandor Qu’était condamné à mort. En consigne d’une gare Un colis ensanglanté! Un escroc est arrêté! Qu’est devenu le cadavre? Le cadavre est bien vivant C’est Fantômas, mes enfants! Prisonnier dans une cloche Sonnant un enterrement Ainsi mourut son lieutenant. Le sang de sa pauv’ caboche Avec saphirs et diamants Pleuvait sur les assistants. Un beau jour des fontaines Soudain chantèr’nt à Paris. Le monde était surpris, Ignorant que ces sirènes De la Concorde enfermaient Un roi captif qui pleurait. Certain secret d’importance Allait être dit au tzar. Fantômas, lui, le reçut car Ayant pris sa ressemblance Il remplaçait l’empereur Quand Juv’ l’arrêta sans peur. Il fit tuer par la Toulouche, Vieillarde aux yeux dégoûtants, Un Anglais à grands coups de dents Et le sang remplit sa bouche. Puis il cacha un trésor Dans les entrailles du mort. Cette grande catastrophe De l’autobus qui rentra Dans la banque qu’on pilla Dont on éventra les coffres… . Vous vous souvenez de ça ... Ce fut lui qui l’agença. La peste en épidémie Ravage un grand paquebot Tout seul au milieu des flots. Quel spectacle de folie! Agonies et morts hélas! Qui a fait ça? Fantômas. Il tua un cocher de fiacre. Au siège il le ficela Et roulant cahin-caha, Malgré les clients qui sacrent, Il ne s’arrêtait jamais L’ fiacre qu’un mort conduisait. Méfiez-vous des roses noires, Il en sort une langueur Épuisante et l’on en meurt. C’est une bien sombre histoire Encore un triste forfait De Fantômas en effet! Il assassina la mère De l’héroïque Fandor. Quelle injustice du sort Douleur poignante et amère... Il n’avait donc pas de cœur, Cet infâme malfaiteur! Du Dôme des Invalides On volait l’or chaque nuit. Qui c’était? mais c’était lui, L’auteur de ce plan cupide. User aussi mal son temps Quand on est intelligent! À la Reine de Hollande Même, il osa s’attaquer. Juve le fit prisonnier Ainsi que toute sa bande. Mais il échappa pourtant À un juste châtiment. Pour effacer sa trace Il se fit tailler des gants Dans la peau d’un trophée sanglant, Dans d’ la peau de mains d’ cadavre Et c’était ce mort qu’accusaient Les empreintes qu’on trouvait. À Valmondois un fantôme Sur la rivière marchait. En vain Juve le cherchait. Effrayant vieillards et mômes, C’était Fantômas qui fuyait Après l’ coup qu’il avait fait. La police d’Angleterre Par lui fut mystifiée. Mais, à la fin, arrêté, Fut pendu et mis en terre. Devinez ce qui arriva: Le bandit en réchappa. Dans la nuit, sinistre et sombre À travers la Tour Eiffel, Juv’ poursuit le criminel. En vain guette-t-il son ombre. Faisant un suprême effort Fantômas échappe encor. D’vant le casino d’ Monte-Carlo Un cuirassé évoluait. Son commandant qui perdait Voulait bombarder la rade. Fantômas, c’est évident Était donc ce commandant. Dans la mer un bateau sombre Avec Fantômas à bord, Hélène Juve et Fandor Et des passagers sans nombre. On ne sait s’ils sont tous morts, Nul n’a retrouvé leurs corps. Ceux de sa bande, Beaumôme, Bec de Gaz et le Bedeau, Le rempart du Montparno, Ont fait trembler Paris, Rome Et Londres par leurs exploits. Se sont-ils soumis aux lois? Pour ceux du peuple et du monde, J’ai écrit cette chanson Sur Fantômas, dont le nom Fait tout trembler à la ronde. Maintenant vivez longtemps Je le souhaite en partant. FINAL Allongeant son ombre immense Sur le monde et sur Paris, Quel est ce spectre aux yeux gris Qui surgit dans le silence? Fantômas, serait-ce toi Qui te dresses sur les toits?
Ballad of Fantomas
Your attention, please! Pray silence For the sad and sorry story, All the grievous inventory, Nameless acts of harm and violence, Every one scot-free, alas! Of the felon Fantomas. First, his mistress, Lady Beltham, Saw the day her husband caught them Making flagrant love together: On the spot the felon killed him. Next he sank the good ship Leopard, Sabotaged, submerged, and scuppered. He commits his hundredth murder. Juve and his assistant Fandor Think to see this libertine Punished by the guillotine. But an actor’s crayoned face Fills the basket in his place. Lighthouse shattered, just like glass. Storm-tossed, luckless ships go down To the lowest depths, and drown. Four heads bobbing on the tide: Lady Beltham, golden-eyed, Fandor, Juve, and Fantomas. Yet the monster’s pretty daughter, Helen, had a noble nature: She was sweet, not taking after Her appalling family, For she rescued poor young Fandor, Who had been condemned to die. In the railway baggage-lockers There’s a gory parcel, bleeding. They’ve detained some gangster cove. What has happened to the carcass? Why, the stiff’s alive and breathing! It is Fantomas, by Jove! Bottled up inside a bell Tolling for a funeral, Death rubbed out his Number Two. Blood cascaded from the skull, Sapphires, diamonds as well, On the gathering below. Paris, one fine day in spring: Suddenly, the fountains sing! People listen in surprise. Little do they realise That the siren melodies Cage a weeping captive king. Vital military clues: Secrets, destined for the Tsar. Smartly turning similar, Fantomas receives the news, Personates the autocrat. Juve arrests him, just like that. He got La Toulouche to kill An Englishman with monstrous bites. She was a hag, a foul-eyed beast! There was blood, he drank his fill, Stashed his looted perquisites In the guts of the deceased. You recall that huge fracas - Raiders took a motor-bus, Rammed the bank, whose vaults they cleared, Rifling safe and automat: Terrible – I’m sure you heard… He was at the back of that. Epidemic of bubonic Plague attacks an oceanic Liner, caught far out at sea. Horrid sights, what lunacy! Agonies and deaths, alas! Who’s the culprit? Fantomas. Killed: one cabman plying for hire, Knotted neatly to his post: Going like a house on fire! Let the inmates curse and swear: They cannot dispute the fare, Driven by a lifeless ghost. Be afraid of jet-black roses. They exhale a languid breath, Murky vapours, dismal gases, Enervating, dealing death. Lamentably, one more time, Fantomas commits the crime! Next he killed the aged mother Of Fandor, the valiant sleuth. Fate miscarried altogether, Sorrow has a bitter tooth… Sure, he had no heart at all, This notorious criminal! Golden-domed, the Invalides Was despoiled by nightly theft. Fantomas devised the deed, Carried out the greedy crime. Having such a mental gift, What a way to use one’s time! He assailed – what insolence! The Queen of the Netherlands. Gallant Juve was quick to bang Up the rogue, with all his gang. Even so, in the event, He evaded punishment. Just in case his dabs betrayed, Fantomas had gloves, well-made From a bleeding trophy’s skin, Hands of one he’d just done in: And the dead man was arraigned By the thumb-prints they obtained. On the waters of the Seine There’s a phantom takes a walk. Juve’s enquiries are in vain. Scaring spooks and older folk, Fantomas is making tracks, After one of his attacks. Scotland Yard: the CID Could not solve the mystery, Till an overdue arrest Saw him hanged and laid to rest. Guess what happened. Need I say? Still the ruffian got away. Up across the Eiffel Tower In the eerie midnight hour Juve pursues the criminal, Trails the shadow. All in vain: With fantastic strength and skill Fantomas escapes again. Monte Carlo. Rouge, pair, passe. Armoured gunboat mounting guard. Captain with gigantic loss Gives the order to bombard. Who’s this captain mounting guard? Clearly, it was Fantomas. Out at sea a vessel founders. Fantomas had been on board. So were Helen, Juve and Fandor And too many to record. Since no bodies have been found, No-one knows if they were drowned. At the deeds of Fantomas And his gang from Montparnasse, (Pretty Boy Sarcophagus, Bill the Beadle, Sniff the Gas), Paris, Rome and London shook. Were they ever brought to book? For yourselves I wrote this song, For the world, for everyone. Everyone is tremulous At the name of Fantomas. May each one of you live long: That’s my wish, and I am gone. Finale Spreading like a mighty pall Over Paris, over all, Who’s the ghost with sombre eyes, Silently observed to rise? Fantomas – a wild surmise: Is that you, against the skies?
From Fortunes, 1942. A radio version by Desnos had been broadcast in 1933, in a ‘superproduction’. All the stanzas were recited, many being amplified by sketches with several actors and elaborate sound-effects. Music was by Kurt Weill; radio production by Paul Deharme; Antonin Artaud directed, and took the title role. The original Fântomas books were by Pierre Souvestre and Marcel Allain, the silent films by Feuillade.

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

Never Another But You

Jamais d’Autre Que Toi

Robert Desnos (1900-45)

Jamais d’Autre Que Toi
Jamais d’autre que toi en dépit des étoiles et des solitudes En dépit des mutilations d’arbre à la tombée de la nuit Jamais d’autre que toi ne poursuivra son chemin qui est le mien Plus tu t’éloignes et plus ton ombre s’agrandit Jamais d’autre que toi ne saluera la mer à l’aube quand fatigué d’errer moi sorti des forêts ténébreuses et des buissons d’orties je marcherai vers l’écume Jamais d’autre que toi ne posera sa main sur mon front et mes yeux Jamais d’autre que toi et je nie le mensonge et l’infidélité Ce navire à l’ancre tu peux couper sa corde Jamais d’autre que toi L’aigle prisonnier dans une cage ronge lentement les barreaux de cuivre vert-de-grisés Quelle évasion! C’est le dimanche marqué par le chant des rossignols dans les bois d’un vert tendre l’ennui des petites filles en présence dune cage où s’agite un serin, tandis que dans la rue solitaire le soleil lentement déplace sa ligne mince sur le trottoir chaud Nous passerons d’autres lignes Jamais jamais d’autre que toi Et moi seul seul seul comme le lierre fané des jardins de banlieue seul comme le verre Et toi jamais d’autre que toi.
Never Another But You
Never another but you for all the stars and solitudes All the trees hacked at nightfall Never another but you shall trace her path which is mine The more you recede the bigger your shadow Never another but you shall greet the sea at dawn when I emerge leg-weary from the dark forests and nettle-patches and make for the foam Never another but you shall put her hand on my brow and my eyes Never another but you. I deny falseness and infidelity That anchored ship you can cut its rope Never another but you The eagle shut in a cage slowly gnaws the verdigris-green copper bars What an escape! It’s Sunday marked by nightingale-song in fresh green woods the boredom of little girls at a fretting canary’s cage, while slowly in the lonely street the sun moves its thin line across the hot pavement We shall pass other lines Never never another but you And me alone alone alone like faded ivy in suburban gardens alone as glass And you never another but you.

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

Conte de Fée

Fairy Tale

Robert Desnos (1900-45)

Fairy Tale
Il était un grand nombre de fois Un homme qui aimait une femme Il était un grand nombre de fois Une femme qui aimait un homme Il était un grand nombre de fois Une femme et un homme Qui n’aimaient pas celui et celle qui les aimaient Il était une fois Une seule fois peut-être Une femme et un homme qui s’aimaient.
Conte de Fée
Once upon many many times A man loved a woman Once upon many many times A woman loved a man Once upon many many times A woman and a man Didn’t love the man and woman who loved them Once upon one time Once upon perhaps only one time A woman and a man loved each other.

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

The Toad

LE CRAPAUD

Robert Desnos (1900-45)

LE CRAPAUD
Sur les bords de la Marne Un crapaud il y a Qui pleure à chaudes larmes Sous un acacia. - Dis-moi pourquoi tu pleures? Mon joli crapaud. - C’est que j'ai le malheur De n'être pas beau. Sur les bords de la Seine Un crapaud il y a Qui chante à perdre haleine Dans son charabia. - Dis-moi pourquoi tu chantes? Mon vilain crapaud. - Je chante à voix plaisante, Car je suis très beau, Des bords de la Marne aux bords de la Seine Avec les sirènes.
The Toad
A toad all warty On the banks of the Marne Weeps hot tears Under a thorn. “Why do you weep, Pretty toad all warty?” “Because by mischance I am no beauty.” A toad all warty On the banks of the Seine Sings at full bellow His uncouth refrain. “Why do you sing, Ugly toad all warty?” “I sing so sweetly Because I’m a beauty. From the Marne’s to the Seine’s environs I sing with the Sirens.”

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

One Day When It Was Night

Un Jour Qu’il Faisait Nuit

Robert Desnos (1900-45)

Un Jour Qu’il Faisait Nuit
Il s’envola au fond de la rivière. Les pierres en bois d’ébène, les fils de fer en or et la     croix sans branche. Tout rien. Je la hais d’amour comme tout un chacun. Le mort respirait de grandes bouffées de vide. Le compas traçait des carrés et des triangles à cinq côtés. Après cela il descendit au grenier. Les étoiles de midi resplendissaient. Le chasseur revenait carnassière pleine de poissons Sur la rive au milieu de la Seine. Un ver de terre marque le centre du cercle sur la cir­conférence. En silence mes yeux prononcèrent un bruyant discours. Alors nous avancions dans une allée déserte où se     pressait la foule. Quand la marche nous eut bien reposé nous eûmes le courage de nous asseoir puis au réveil nos yeux se fermèrent et l’aube versa sur nous les réservoirs de la nuit. La pluie nous sécha.
One Day When It Was Night
He flew off to the bottom of the river. Stones of ebony wood, steel wires of gold, a cross with no     cross-piece. All nothing. I hate her with a love like just anyone. The dead man breathed great gulps of emptiness. The compass traced squares and triangles with five sides. After that he went down into the loft. The midday stars were shining. The hunter returned, his game-bag full of fish On the bank in the middle of the Seine. An earthworm marks the centre of the circle on the circumference. In silence my eyes uttered a noisy speech. Then we moved up a deserted avenue where people were     thronging. When marching had given us a good rest we had the courage to sit down then as we woke our eyes closed and dawn poured on us the reservoirs of night. The rain dried us.
‘Robert Desnos, Surrealist, Lover, Resistant’, Arc Publications

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

MIMOSA

LE MIMOSA [Chantefleurs]

Robert Desnos (1900-45)

LE MIMOSA [Chantefleurs]
Sur la route de Saint-Tropez, Mimosa Monsieur, mimosa Madame Sur la route de Saint-Tropez, De Saint-Tropez à La Ciotat, Cueillez le mimosa, Cueillez-le pour l’offrir aux dames.
MIMOSA
On the way from St Tropez, Mimosa Sir, Mimosa Ma’am, On the way from St Tropez, Cull mimosas round the bay, Cull them closer to Marseille, Offer the ladies this bouquet.

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

Six Storysongs

Six Chantefables

Robert Desnos (1900-45)

Six Chantefables
L’ESCARGOT Est-ce que le temps est beau? Se demandait l’escargot Car, pour moi, s’il faisait beau C’est qu’il ferait vilain temps. J’aime qu’il tombe de l’eau, Voilà mon tempérament. Combien de gens, et sans coquille, N’aiment pas que le soleil brille. Il est caché? Il reviendra! L’escargot? On le mangera. LE PÉLICAN Le capitaine Jonathan, Étant âgé de dix-huit ans, Capture un jour un pélican Dans une île d’Extrême-Orient. Le pélican de Jonathan, Au matin, pond un œuf tout blanc Et il en sort un pélican Lui ressemblant étonnamment. Et ce deuxième pélican Pond à son tour, un œuf tout blanc D’où sort, inévitablement, Un autre qui en fait autant. Cela peut durer pendant très longtemps Si l’on ne fait pas d’omelette avant. LA SAUTERELLE Saute, saute, sauterelle Car c’est aujourd’hui jeudi. Je sauterai, nous dit-elle, Du lundi au samedi. Saute, saute, sauterelle, À travers tout le quartier. Sautez donc, mademoiselle, Puisque c’est votre métier.
LA FOURMI Une fourmi de dix-huit mètres Avec un chapeau sur la tête, Ça n’existe pas, ça n’existe pas. Une fourmi traînant un char Plein de pingouins et de canards, Ça n’existe pas, ça n’existe pas. Une fourmi parlant français, Parlant latin et javanais, Ça n’existe pas, ça n’existe pas.     Eh! Pourquoi pas? LE LÉOPARD Si tu vas dans les bois, Prends garde au léopard. Il miaule à mi-voix Et vient de nulle part. Au soir, quand il ronronne, Un gai rossignol chante Et la forêt béante Les écoute et s’étonne, S’étonne qu'en ses bois Vienne le léopard Qui ronronne à mi-voix Et vient de nulle part. LE VER LUISANT Ver luisant tu luis à minuit, Tu t’allumes sous les étoiles Et, quand tout dort, tu t’introduis Dans la lune et ronge sa moelle. La lune, nid des vers luisants, Dans le ciel continue sa route. Elle sème sur les enfants, Sur tous les beaux enfants dormant, Rêve sur rêve, goutte sur goutte.
Six Storysongs
THE SNAIL Is to-day fine? The snail was wondering. I’d call it fine If the rain were thundering Down. I like the wettest weather: That’s the way I’m put together. How many folk with a soft exterior Greet the sunshine with hysteria. Sun gone in? Just wait! Just wait! The snail ends up on the dinner-plate. THE PELICAN A captain known as Jonathan, Who’s turned eighteen, become a man, Captures, one day, a pelican, On Gan, Hainan, or Banaban. The pelican of Jonathan Lays a white egg, at nine a.m. Out of it jumps a pelican With an astonishing resem- Blance to the first. This pelican Lays its white egg in turn, and then, Of course, another pelican Jumps out to do the same again. This state of things may never end Unless an omelette bucks the trend. THE GRASSHOPPER Hop, grasshopper, hop away, Thursday, Friday, Saturday. I shall hop, we heard her say, From Monday to the latter day. Hop, grasshopper, hop away, All around the quarter, Hop, that’s your job all day, Being your mother’s daughter. (That’s what they taught her.) THE ANT Ant, an eighteen-metre ant, Hat on head insouciant, Cannot happen on this planet. Ant that hauls a pair of trucks Crammed with penguins and with ducks, Cannot happen on this planet. Ant that spouts with fluent ease Latin, French and Javanese, Cannot happen on this planet.     Or can it? THE LEOPARD If you go in the wood Watch out for the leopard He furtively mewed He dropped in and scarpered At night when he purrs Sweet nightingales sing And the forest infers It’s a wonderful thing To think that this wood Is the haunt of the leopard Who furtively purred Who dropped in and scarpered. THE GLOW-WORM Glow-worm glowing in the night, Under the stars you self-ignite. When we’re all asleep, you burrow Into the moon and munch its marrow. Glow-worms’ nest, the Moon, up top, Sails the sky and doesn’t stop. On the children she will seep, On the pretty things asleep, Dream on dream, drop by drop.

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

In Helmet

Casqués du heaume

Robert Desnos (1900-45)

Casqués du heaume
Casqués du heaume et cuirassés, S’en sont partis les gens de guerre. Les chemins creux sont défoncés Où nous cachions nos amours printanières. ……………………… Car l’homme doit aimer son frère Comme l’oisel aime l’oisel! Et partir avec lui la terre Comme ils se partissent le ciel. Casqués du heaume et cuirassés S’en sont partis les gens de guerre. Les chemins creux sont défoncés Où nous cachions nos amours printanières. Mais peu s’en soucie la nature, Les fleurettes poussent aux prés, L’oisel jargonne en la ramure, Le cerf en rut court les forêts. Et nous aussi devons aimer, Viens-t-en ès champs et feuillage Nous livrant aux jeux printaniers, Oublier la guerre sauvage. Casqués du heaume et cuirassés, S’en sont partis les gens de guerre. Les chemins creux sont défoncés Où nous cachions nos amours printanières.
In Helmet
In helmet and in breastplate They went to fight the wars. The sunken lanes are smashed to bits That hid our spring amours. ………………… For man must love his brother As two birds of a feather Share earth with one another The way they share the weather. In helmet and in breastplate They went to fight the wars. The sunken lanes are smashed to bits That hid our spring amours. It’s all the same to nature, Buds blossom in the meadow, Woods run with rutting roe-deer, Birds chirp in leafy shadow. And we must do our loving, Find fields and trees once more, Find spring and fun of living, Forget the savage war. In helmet and in breastplate They went to fight the wars. The sunken lanes are smashed to bits That hid our spring amours.
published 1919 © Éditions Gallimard In ‘Robert Desnos, Surrealist, Lover, Resistant’ (Arc Publications). And in Agenda 2018

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...

The Legacy

Le Legs

Robert Desnos (1900-45)

1943: posters say Victor Hugo would back the régime.
Le Legs
Et voici, Père Hugo, ton nom sur les murailles! Tu peux te retourner au fond du Panthéon Pour savoir qui a fait cela. Qui l’a fait? On! On c’est Hitler, on c’est Goebbels ... C’est la racaille, Un Laval, un Pétain, un Bonnard, un Brinon, Ceux qui savent trahir et ceux qui font ripaille, Ceux qui sont destinés aux justes représailles Et cela ne fait pas un grand nombre de noms. Ces gens de peu d’esprit et de faible culture Ont besoin d’alibis dans leur sale aventure. Ils ont dit: « Le bonhomme est mort. Il est dompté. » Oui, le bonhomme est mort. Mais par-devant notaire Il a bien précisé quel legs il voulait faire: Le notaire a nom: France, et le legs: Liberté.
The Legacy
Hugo! So here’s your name on every wall! Deep in the Pantheon, turn in your grave, And ask: who’s done this? Hitler! Goebbels! They’ve Done it, the guttersnipes: Pétain, Laval, Bonnard, Brinon: accomplished traitors all, High on the hog. They’ve done it, and they must Face retribution, merciless and just; And there are not that many names at all. These mindless and uncultured men have made A smokescreen for their filthy escapade: ‘The fellow’s dead and gone,’ apparently. The fellow’s dead. Yet his bequest is clear: His legacy is signed and proven here, Witnessed by France; we call it Liberty.
In my books of Desnos from Arc Publications and Hugo from Hearing Eye. appeared 14 July 1943 in L’Honneur des Poètes and in Ce Cœur qui Haïssait la Guerre, 1944

Translation: Copyright © Timothy Adès

More poems by Robert Desnos...