To the Trees

Aux arbres

Victor Hugo (1802-85)

Aux arbres
Arbres de la forêt, vous connaissez mon âme! Au gré des envieux, la foule loue et blâme ; Vous me connaissez, vous! - vous m'avez vu souvent, Seul dans vos profondeurs, regardant et rêvant. Vous le savez, la pierre où court un scarabée, Une humble goutte d'eau de fleur en fleur tombée, Un nuage, un oiseau, m'occupent tout un jour. La contemplation m'emplit le coeur d'amour. Vous m'avez vu cent fois, dans la vallée obscure, Avec ces mots que dit l'esprit à la nature, Questionner tout bas vos rameaux palpitants, Et du même regard poursuivre en même temps, Pensif, le front baissé, l'oeil dans l'herbe profonde, L'étude d'un atome et l'étude du monde. Attentif à vos bruits qui parlent tous un peu, Arbres, vous m'avez vu fuir l'homme et chercher Dieu! Feuilles qui tressaillez à la pointe des branches, Nids dont le vent au loin sème les plumes blanches, Clairières, vallons verts, déserts sombres et doux, Vous savez que je suis calme et pur comme vous. Comme au ciel vos parfums, mon culte à Dieu s'élance, Et je suis plein d'oubli comme vous de silence! La haine sur mon nom répand en vain son fiel ; Toujours, - je vous atteste, ô bois aimés du ciel! - J'ai chassé loin de moi toute pensée amère, Et mon coeur est encor tel que le fit ma mère! Arbres de ces grands bois qui frissonnez toujours, Je vous aime, et vous, lierre au seuil des autres sourds, Ravins où l'on entend filtrer les sources vives, Buissons que les oiseaux pillent, joyeux convives! Quand je suis parmi vous, arbres de ces grands bois, Dans tout ce qui m'entoure et me cache à la fois, Dans votre solitude où je rentre en moi-même, Je sens quelqu'un de grand qui m'écoute et qui m'aime! Aussi, taillis sacrés où Dieu même apparaît, Arbres religieux, chênes, mousses, forêt, Forêt! c'est dans votre ombre et dans votre mystère, C'est sous votre branchage auguste et solitaire, Que je veux abriter mon sépulcre ignoré, Et que je veux dormir quand je m'endormirai.
To the Trees
You forest trees, how well you know my mind! The envious crowd is raucous and unkind; You know my soul! You’ve seen me as I’ve gone Gazing and musing in your depths alone: You know the outcrop that the beetle scours, The humble raindrop falling through the flowers, A bird, a cloud: all day I cannot move, As contemplation fills my heart with love. Often you’ve seen me, in the shady glen, Find words to put to nature from the brain, Quietly questioning your trembling boughs; Then, equable, and simultaneous, Pensive, head down, eyes on the leaves of grass, I quiz the atom and the universe. Trees, in your sounds I hear your every word: Through you, I flee from man and seek the Lord! You leaves that quiver at a branch’s end, Nests whose white feathers journey on the wind, Clearings, green vales, wild places, bane or balm, You know that, just like you, I’m pure and calm. My prayers climb to heaven like your fragrance; My skill is to forget, as yours is silence! In vain upon me hatred’s bile is poured; Hear this, you woods belovéd of the Lord! All bitter thoughts are banished and must fade: My heart is still the heart my mother made! I love the trees who shudder in the groves, And ivy too, mute climber on mute boughs; Ravines where living springs are heard to spill, Shrubs the birds plunder, feasting with a will! Surrounded in your forests, mighty trees, Safely concealed, I know this truth, at ease Within myself, and all alone with you: That a great being hears and loves me too! Forest, I’ll seek your shade and mystery, Under your solemn lonely canopy, And hide my grave in calm obscurity: For when I sleep, it’s there I wish to be.
Published online by Richard Berengarten, the Tree Project

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Come! Flute invisible

Viens ! - une flûte invisible

Victor Hugo (1802-85)

Viens ! - une flûte invisible
Viens ! - une flûte invisible Soupire dans les vergers. - La chanson la plus paisible Est la chanson des bergers. Le vent ride, sous l'yeuse, Le sombre miroir des eaux. - La chanson la plus joyeuse Est la chanson des oiseaux. Que nul soin ne te tourmente. Aimons-nous! aimons toujours ! - La chanson la plus charmante Est la chanson des amours.
Come! Flute invisible
Come! Flute invisible Sighs in the orchards. Song most peaceable, Song of the shepherds. Holm-oak: winds ruffle Dark mirror-waters. Song most joyful, Song of winged creatures. Be you not fretful! Let’s love for ever. Song most delightful, Song of the lover.
For François Le Roux

Translation: Copyright © Timothy Adès

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The Moon

La Lune

Victor Hugo (1802-85)

La Lune
L’Olympe a dans l’azur des degrés inconnus ; Un jour, en descendant cet escalier, Vénus Tomba, se fit des bleus ailleurs que sur la face, Et les hommes en bas rirent ; l’effroi s’efface Quand on peut voir les dieux par leur autre côté. - Soit, dit alors Vénus, pour leur rire effronté, Les hommes, ayant eu cette bonne fortune, Ne verront plus de moi que cela. –                                                         C’est la lune!
The Moon
Mount Olympus in heaven has steps, not well-known. One day on this staircase, as Venus came down, She fell, and got bruises, and not on her face. Down below, people tittered. Now, dread has no place, When we get a clear view of the gods’ other side. Such merriment! Venus was quite mortified. She said: ‘Well! Since mankind has enjoyed such a boon, They shall see nothing else of me: only…’ - The Moon!
(Toute la lyre, VII, 14 ; p. 454)

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Luna

Luna (Jersey, le 31 mars 1853)

Victor Hugo (1802-85)

Luna (Jersey, le 31 mars 1853)
Ô France, quoique tu sommeilles, Nous t'appelons, nous les proscrits ! Les ténèbres ont des oreilles, Et les profondeurs ont des cris. Le despotisme âpre et sans gloire Sur les peuples découragés Ferme la grille épaisse et noire Des erreurs et des préjugés ; Il tient sous clef l'essaim fidèle Des fermes penseurs, des héros, Mais l'Idée avec un coup d'aile Ecartera les durs barreaux, Et, comme en l'an quatre-vingt-onze, Reprendra son vol souverain ; Car briser la cage de bronze, C'est facile à l'oiseau d'airain. L'obscurité couvre le monde, Mais l'Idée illumine et luit ; De sa clarté blanche elle inonde Les sombres azurs de la nuit. Elle est le fanal solitaire, Le rayon providentiel. Elle est la lampe de la terre Qui ne peut s'allumer qu'au ciel. Elle apaise l'âme qui souffre, Guide la vie, endort la mort ; Elle montre aux méchants le gouffre, Elle montre aux justes le port. En voyant dans la brume obscure L'Idée, amour des tristes yeux, Monter calme, sereine et pure, Sur l'horizon mystérieux, Les fanatismes et les haines Rugissent devant chaque seuil, Comme hurlent les chiens obscènes Quand apparaît la lune en deuil. Oh ! contemplez l'Idée altière, Nations ! son front surhumain A, dès à présent, la lumière Qui vous éclairera demain !
Luna
O France, though you are lulled in sleep, Hear us, the banished! hear our call! The shades have ears to hear; the deep Has cries to voice, has tears to weep. Harsh tyranny inglorious Oppresses and discourages, Holds us behind the thick black bars Of error and of prejudice, Holds heroes under lock and key, The faithful band of steadfast hearts. But Thought’s bright wing shall presently Smash the hard prison-bars apart, And as in ’91, again In soaring flight shall all surpass! To break the bars of bronze in twain Is easy for the bird of brass. The world is all obscurity; But Thought illumines, throws a light, Flooding with limpid clarity The sombre shadows of the night. Thought is the lonely beacon-light, Thought is the providential ray, Only in heaven flaring bright, The lamp of earth till dawn of day. Thought soothes the soul’s unhappiness, Life’s guiding star, that shuts death’s eyes, Showing the wicked the abyss, Showing the good where safety lies. When Thought looms up in mists obscure, For grieving eyes a vision fond, And rises, calm, serene and pure In the mysterious beyond, Delusions, hatreds, zealotries At every threshold roar and wail, As loathsome dogs howl obloquies, Bay at the moon’s funereal veil. Nations! Take heed of lofty Thought, Whose superhuman brow displays, Already, that refulgent light, The light to guide you, all your days.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Waterloo

Watterloo

Victor Hugo (1802-85)

From: The Expiation - Moscow, Waterloo, St Helena
Watterloo
Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine ! Comme une onde qui bout dans une urne trop pleine, Dans ton cirque de bois, de coteaux, de vallons, La pâle mort mêlait les sombres bataillons. D’un côté c’est l’Europe et de l’autre la France. Choc sanglant ! des héros Dieu trompait l’espérance ; Tu désertais, victoire, et le sort était las. Ô Waterloo ! je pleure et je m’arrête, hélas ! Car ces derniers soldats de la dernière guerre Furent grands ; ils avaient vaincu toute la terre, Chassé vingt rois, passé les Alpes et le Rhin, Et leur âme chantait dans les clairons d’airain ! Le soir tombait ; la lutte était ardente et noire. Il avait l’offensive et presque la victoire ; Il tenait Wellington acculé sur un bois. Sa lunette à la main, il observait parfois Le centre du combat, point obscur où tressaille La mêlée, effroyable et vivante broussaille, Et parfois l’horizon, sombre comme la mer. Soudain, joyeux, il dit : Grouchy ! — C’était Blücher ! L’espoir changea de camp, le combat changea d’âme, La mêlée en hurlant grandit comme une flamme. La batterie anglaise écrasa nos carrés. La plaine où frissonnaient les drapeaux déchirés Ne fut plus, dans les cris des mourants qu’on égorge, Qu’un gouffre flamboyant, rouge comme une forge ; Gouffre où les régiments, comme des pans de murs, Tombaient, où se couchaient comme des épis mûrs Les hauts tambours-majors aux panaches énormes, Où l’on entrevoyait des blessures difformes ! Carnage affreux ! moment fatal ! L’homme inquiet Sentit que la bataille entre ses mains pliait. Derrière un mamelon la garde était massée, La garde, espoir suprême et suprême pensée ! — Allons ! faites donner la garde, — cria-t-il, — Et lanciers, grenadiers aux guêtres de coutil, Dragons que Rome eût pris pour des légionnaires, Cuirassiers, canonniers qui traînaient des tonnerres, Portant le noir colback ou le casque poli, Tous, ceux de Friedland et ceux de Rivoli, Comprenant qu’ils allaient mourir dans cette fête, Saluèrent leur dieu, debout dans la tempête. Leur bouche, d’un seul cri, dit : vive l’empereur ! Puis, à pas lents, musique en tête, sans fureur, Tranquille, souriant à la mitraille anglaise, La garde impériale entra dans la fournaise. Hélas ! Napoléon, sur sa garde penché, Regardait, et, sitôt qu’ils avaient débouché Sous les sombres canons crachant des jets de soufre, Voyait, l’un après l’autre, en cet horrible gouffre, Fondre ces régiments de granit et d’acier, Comme fond une cire au souffle d’un brasier. Ils allaient, l’arme au bras, front haut, graves, stoïques. Pas un ne recula. Dormez, morts héroïques ! Le reste de l’armée hésitait sur leurs corps Et regardait mourir la garde. — C’est alors Qu’élevant tout à coup sa voix désespérée, La Déroute, géante à la face effarée, Qui, pâle, épouvantant les plus fiers bataillons, Changeant subitement les drapeaux en haillons, À de certains moments, spectre fait de fumées, Se lève grandissante au milieu des armées, La Déroute apparut au soldat qui s’émeut, Et, se tordant les bras, cria : Sauve qui peut ! Sauve qui peut ! — affront ! horreur ! — toutes les bouches Criaient ; à travers champs, fous, éperdus, farouches, Comme si quelque souffle avait passé sur eux, Parmi les lourds caissons et les fourgons poudreux, Roulant dans les fossés, se cachant dans les seigles, Jetant shakos, manteaux, fusils, jetant les aigles, Sous les sabres prussiens, ces vétérans, ô deuil ! Tremblaient, hurlaient, pleuraient, couraient ! — En un clin d’œil, Comme s’envole au vent une paille enflammée, S’évanouit ce bruit qui fut la grande armée, Et cette plaine, hélas, où l’on rêve aujourd’hui, Vit fuir ceux devant qui l’univers avait fui ! Quarante ans sont passés, et ce coin de la terre, Waterloo, ce plateau funèbre et solitaire, Ce champ sinistre où Dieu mêla tant de néants, Tremble encor d’avoir vu la fuite des géants ! Napoléon les vit s’écouler comme un fleuve ; Hommes, chevaux, tambours, drapeaux ; — et dans l’épreuve Sentant confusément revenir son remords, Levant les mains au ciel, il dit : — Mes soldats morts, Moi vaincu ! mon empire est brisé comme verre. Est-ce le châtiment cette fois, Dieu sévère ? — Alors parmi les cris, les rumeurs, le canon, Il entendit la voix qui lui répondait : Non !
Waterloo
Waterloo! Waterloo! disastrous field! Like a wave swelling in an urn brim-filled, Your ring of hillsides, valleys, woods and heath Saw grim battalions snarled in pallid death. On this side France, against her Europe stood: God failed the heroes in the clash of blood! Destiny faltered, victory turned tail. O Waterloo, alas! I weep, I fail! Those last great soldiers of the last great war Were giants, each the whole world's conqueror: Crossed Alps and Rhine, made twenty tyrants fall. Their soul sang in the brazen bugle-call! * Night fell; the fight was burning fierce, and black. He grasped the victory, was on the attack, Held Wellington pinned down against a wood. Eyeglass in hand, observing all, he stood: Now the dark midpoint of the battle’s fires, A throbbing clutch of frightful, living briars; Now the horizon, sombre as the sea. He gave a sudden, joyous cry: ‘Grouchy!’ ’Twas Blücher! Hope changed sides, the combat swayed, Like wildfire surged the howling fusillade. The guns of England broke the squares of France. Amid the cries of slaughtered combatants, The plain where our torn banners shook and spread Was but a fiery chasm, furnace-red. Regiments tumbled down like lengths of wall. Like stalks of corn the great drum-majors fall, Their plumes, full-length, enormous on the ground; And every view revealed a hideous wound. Grim carnage! fatal moment! There he stands, Anxious, the battle pliant in his hands. Behind a little hill was massed the Guard, The last great hope, supreme and final word! ‘Send in the Guard!’ he cries, and grenadiers In their white gaiters, lancers, cuirassiers, Dragoons that Rome would count among her sons, Men who unleashed the thunder of the guns, The men of Friedland and of Rivoli, Black busbies, gleaming helms, in panoply, Knowing this solemn feast must be their last, Salute their god, erect amid the blast. ‘Long live the emperor!’ A single cry; Then at slow march, bands playing, steadily, The Guard came smiling on, the Imperial, Where English salvoes raked the crucible. Alas! Napoleon with gaze intense Watched the advance: he saw his regiments Under the sulphurous venom of the guns: He saw those troops of stone and steel at once Melted, all melted in the pit of death, As melts the wax beneath the brazier's breath. Steadfast and stoic, sloped arms and unbowed head, They went. None flinched. Then sleep, heroic dead! ... All the remainder stood and stared, held hard, Motionless watched the death-throes of the Guard. All of a sudden now they see her rise: Defeat! Grim-faced, with loud despairing cries, Putting the proudest regiments in dread, Turning their banners to a tattered shred, At certain times, a wraith, a smoke-wreathed ghost, Rears up erect and huge amid the host. Wringing her hands, to soldiers terrified, Defeat appeared: ‘Run for your lives!’ she cried. Run for your lives! shame, dread! each soldier bawled: Across the fields, distraught, wild-eyed, appalled, Between the dusty wagons and the kegs As if a wind came blowing on their legs, In ditches rolled, in cornfields crouched to hide, Their shakos, coats, guns, eagles cast aside Under the Prussian swords, each veteran (O sorrow!) howled with terror, wept and ran. At once, like burning straw by tempests blown, All the Grand Army’s battle-roar was gone. Here we may stand, and dream: for from this site They fled, who put the universe to flight. Forty years on, this shunned and dismal field, This Waterloo, this crevice of the world, Where God piled nullity on nullity, Still trembles to have seen the giants flee! * Napoleon saw them pouring like a flood: Men, steeds, drums, flags. Facing his fate he stood, Confused, as if repining; then he said, Raising his hands to heaven: ‘My soldiers dead, I and my empire broken in the dust. Is this thy chastening, O God most just?’ Amid the cries, the guns, the tumult, lo! He heard the voice that gave him answer: No!
Winner, John Dryden Prize. Published in 'Comparative Criticism' (Cambridge U.P.) and by The Napoleonic Society of America.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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St Helena

Ste-Hélène

Victor Hugo (1802-85)

Third poem in L'Expiation, following Moscow and Waterloo. All published by The Napoleonic Society of America, and in Translation and Literature (Edinburgh U.P.)
Ste-Hélène
Il croula. Dieu changea la chaîne de l’Europe. Il est, au fond des mers que la brume enveloppe, Un roc hideux, débris des antiques volcans. Le Destin prit des clous, un marteau, des carcans, Saisit, pâle et vivant, ce voleur du tonnerre, Et, joyeux, s’en alla sur le pic centenaire Le clouer, excitant par son rire moqueur Le vautour Angleterre à lui ronger le cœur. Évanouissement d’une splendeur immense ! Du soleil qui se lève à la nuit qui commence, Toujours l’isolement, l’abandon, la prison, Un soldat rouge au seuil, la mer à l’horizon, Des rochers nus, des bois affreux, l’ennui, l’espace, Des voiles s’enfuyant comme l’espoir qui passe, Toujours le bruit des flots, toujours le bruit des vents ! Adieu, tente de pourpre aux panaches mouvants, Adieu, le cheval blanc que César éperonne ! Plus de tambours battant aux champs, plus de couronne, Plus de rois prosternés dans l’ombre avec terreur, Plus de manteau traînant sur eux, plus d’empereur ! Napoléon était retombé Bonaparte. Comme un romain blessé par la flèche du Parthe, Saignant, morne, il songeait à Moscou qui brûla. Un caporal anglais lui disait : halte-là ! Son fils aux mains des rois ! sa femme aux bras d’un autre ! Plus vil que le pourceau qui dans l’égout se vautre, Son sénat qui l’avait adoré l’insultait. Au bord des mers, à l’heure où la bise se tait, Sur les escarpements croulant en noirs décombres, Il marchait, seul, rêveur, captif des vagues sombres. Sur les monts, sur les flots, sur les cieux, triste et fier, L’œil encore ébloui des batailles d’hier, Il laissait sa pensée errer à l’aventure. Grandeur, gloire, ô néant ! calme de la nature ! Les aigles qui passaient ne le connaissaient pas. Les rois, ses guichetiers, avaient pris un compas Et l’avaient enfermé dans un cercle inflexible. Il expirait. La mort de plus en plus visible Se levait dans sa nuit et croissait à ses yeux Comme le froid matin d’un jour mystérieux. Son âme palpitait, déjà presque échappée. Un jour enfin il mit sur son lit son épée, Et se coucha près d’elle, et dit : « C’est aujourd’hui » On jeta le manteau de Marengo sur lui. Ses batailles du Nil, du Danube, du Tibre, Se penchaient sur son front, il dit : « Me voici libre ! Je suis vainqueur ! je vois mes aigles accourir ! » Et, comme il retournait sa tête pour mourir, Il aperçut, un pied dans la maison déserte, Hudson Lowe guettant par la porte entrouverte. Alors, géant broyé sous le talon des rois, Il cria : « La mesure est comble cette fois ! Seigneur ! c’est maintenant fini ! Dieu que j’implore, Vous m’avez châtié ! » La voix dit : Pas encore !
St Helena
He fell; and God changed Europe's iron bands. Far in the fog-bound seas a vile rock stands, Belched up by old volcanoes. Destiny Took nails and clamps and neck-irons, gleefully, Seized him who stole the thunder, living, pale, And dragged him to the grizzled peak, to nail Him down, and with a mocking laugh to start The vulture England gnawing at his heart. * Immeasurable splendour, passed away! From earliest sunrise till the end of day Ever alone, abandoned, caged in prison; A redcoat near; beyond, the sea's horizon. Bare rocks, grim woods, depression, emptiness: Sails passing, fleeing into hopelessness. The sound of winds and waves for evermore! Farewell, white horse that Caesar spurs to war, Farewell the pounding drums, the stratagem, The purple tent, the plumes, the diadem! No quaking prostrate kings inferior; No robe trailed over them; no emperor. Napoleon was reduced to Bonaparte. He thought of Moscow burning, sick at heart As Roman bleeding from the Parthian bolt: An English corporal, to bid him Halt! Kings held his son; his wife was spoken for; Worse than a pig that wallows in a sewer, His senate cursed him, worshipping no more. When ocean winds fall still, he walked the shore On cliffs that crumbled in black heaps of stone, The dark waves' captive, dreaming and alone. As bygone battles still amazed his eye, With rueful pride on hill and sea and sky He cast his thoughts, to stray on high adventure. Grandeur and glory, void! the calm of nature! Eagles pass by, not knowing who he is. The kings, his jailers, took their compasses And closed him in a ring inflexible. He sickened. Death more and more visible Rose in the night and grew before his eyes, Like the cold breaking of a strange sunrise. His soul, that fluttered still, was almost fled. At last he laid his sword upon his bed, And took his place, and said `This is the day'. The greatcoat of Marengo on him lay. Nile, Danube, Tiber: battles on his brow Gathered. Said he: `I am unfettered now! I am victorious! Come, my eagles, fly!' And as he turned his head aside to die, Intruding in the empty house he saw Hudson Lowe watching through the half-closed door. The kings beneath their heel had trampled him! `Full measure!' cried the giant; `to the brim! Now it is finished! God whom I implore, Thy chastening's done!' The voice said, `There is More!'

Translation: Copyright © Timothy Adès

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The Sons of our Sons

Les fils de nos fils

Victor Hugo (1802-85)

Les fils de nos fils
Viens, mon George. Ah! les fils de nos fils nous enchantent, Ce sont de jeunes voix matinales qui chantent. Ils sont dans nos logis lugubres le retour Des roses, du printemps, de la vie et du jour! Leur rire nous attire une larme aux paupières Et de notre vieux seuil fait tressaillir les pierres; De la tombe entr'ouverte et des ans lourds et froids Leur regard radieux dissipe les effrois; Ils ramènent notre âme aux premières années; Ils font rouvrir en nous toutes nos fleurs fanées; Nous nous retrouvons doux, naïfs, heureux de rien; Le coeur serein s'emplit d'un vague aérien; En les voyant on croit se voir soi-même éclore; Oui, devenir aïeul, c'est rentrer dans l'aurore. Le vieillard gai se mêle aux marmots triomphants. Nous nous rapetissons dans les petits enfants. Et, calmés, nous voyons s'envoler dans les branches Notre âme sombre avec toutes ces âmes blanches.
The Sons of our Sons
Come, George. The sons of our sons are enchanting! They are young voices that sing at the dawning, Light in our joyless homes, the returning Of roses and springtime, of life and morning! Their laugh makes our eyelids wet with tears And sets the old stones of our threshold shaking; Their radiant faces dispel the fears Of heavy old age and the cold grave yawning. They take us back to our earliest years, To be soft and simple and glad without reason, An airy vagueness the blithe heart taking: We see ourselves in our flowering season: Grandfathers return to the day’s awaking. The jubilant young join the happy old man, Little children who let us be little again. Serenely we witness, among all these Bright souls, our dark soul take to the trees.
From 'How to be a Grandfather', Hearing Eye: L'art d'être grand-père.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Penniless Children

Les enfants pauvres

Victor Hugo (1802-85)

From 'L'art d'être grand-père' - My words are in 'How to be a Grandfather' - Hearing Eye
Les enfants pauvres
Prenez garde à ce petit être ; Il est bien grand, il contient Dieu. Les enfants sont, avant de naître, Des lumières dans le ciel bleu. Dieu nous les offre en sa largesse ; Ils viennent ; Dieu nous en fait don ; Dans leur rire il met sa sagesse Et dans leur baiser son pardon. Leur douce clarté nous effleure. Hélas, le bonheur est leur droit. S'ils ont faim, le paradis pleure. Et le ciel tremble, s'ils ont froid. La misère de l'innocence Accuse l'homme vicieux. L'homme tient l'ange en sa puissance. Oh ! quel tonnerre au fond des cieux, Quand Dieu, cherchant ces êtres frêles Que dans l'ombre où nous sommeillons Il nous envoie avec des ailes, Les retrouve avec des haillons !
Penniless Children
Watch this little one with care, Filled with God, and great in worth; Babes, before they come to birth, Shine above in azure air. God in bounty gives us this: They are sent to us on earth, All his wisdom in their mirth, All his mercy in their kiss. We are warmed in their sweet light; They are cold, and heaven shivers; They are hungry, Eden suffers; Happiness is theirs by right. Men have angels in their power: Every innocent unfed Puts on trial the evildoer. Thunder’s rage shall wake the dead: God, who sent these pretty things To our den of sleep and shadows, Sent them down to us with wings, Finds them wearing rags and tatters! Translation below by Swinburne, a great admirer of Hugo The Poor Children Take heed of this small child of earth; He is great; he hath in him God most high. Children before their fleshly birth Are lights alive in the blue sky. In our light bitter world of wrong They come; God gives us them awhile. His speech is in their stammering tongue, And his forgiveness in their smile. Their sweet light rests upon our eyes. Alas! their right to joy is plain. If they are hungry Paradise Weeps, and, if cold, Heaven thrills with pain. The want that saps their sinless flower Speaks judgment on sin's ministers. Man holds an angel in his power. Ah! deep in Heaven what thunder stirs, When God seeks out these tender things Whom in the shadow where we sleep He sends us clothed about with wings, And finds them ragged babes that weep!

Translation: Copyright © Timothy Adès

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The Dawn is Alight

L'aurore s'allume

Victor Hugo (1802-85)

L'aurore s'allume
I L’aurore s’allume ; L’ombre épaisse fuit ; Le rêve et la brume Vont où va la nuit ; Paupières et roses S’ouvrent demi-closes ; Du réveil des choses On entend le bruit. Tout chante et murmure, Tout parle à la fois, Fumée et verdure, Les nids et les toits ; Le vent parle aux chênes, L’eau parle aux fontaines ; Toutes les haleines Deviennent des voix ! Tout reprend son âme, L’enfant son hochet, Le foyer sa flamme, Le luth son archet ; Folie ou démence, Dans le monde immense, Chacun. recommence Ce qu’il ébauchait. Qu’on pense ou qu’on aime, Sans cesse agité, Vers un but suprême, Tout vole emporté ; L’esquif cherche un môle, L’abeille un vieux saule, La boussole un pôle, Moi la vérité ! II Vérité profonde ! Granit éprouvé Qu’au fond de toute onde Mon ancre a trouvé ! De ce monde sombre, Où passent dans l’ombre Des songes sans nombre, Plafond et pavé ! Vérité, beau fleuve Que rien ne tarit ! Source où tout s’abreuve, Tige où tout fleurit ! Lampe que Dieu pose Près de toute cause ! Clarté que la chose Envoie à l’esprit ! Arbre à rude écorce, Chêne au vaste front, Que selon sa force L’homme ploie ou rompt, D’où l’ombre s’épanche ; Où chacun se penche, L’un sur une branche, L’autre sur le tronc ! Mont d’où tout ruisselle ! Gouffre où tout s’en va ! Sublime étincelle Que fait Jéhova ! Rayon qu’on blasphème ! Oeil calme et suprême Qu’au front de Dieu même L’homme un jour creva ! III Ô Terre ! ô merveilles Dont l’éclat joyeux Emplit nos oreilles, Eblouit nos yeux ! Bords où meurt la vague, Bois qu’un souffle élague, De l’horizon vague Plis mystérieux ! Azur dont se voile L’eau du gouffre amer, Quand, laissant ma voile Fuir au gré de l’air, Penché sur la lame, J’écoute avec l’âme Cet épithalame Que chante la mer ! Azur non moins tendre Du ciel qui sourit Quand, tâchant d’entendre Je cherche, ô nature, Ce que dit l’esprit, La parole obscure Que le vent murmure, Que l’étoile écrit ! Création pure ! Etre universel ! Océan, ceinture De tout sous le ciel ! Astres que fait naître Le souffle du maître, Fleurs où Dieu peut-être Cueille quelque miel ! Ô champs ! ô feuillages ! Monde fraternel ! Clocher des villages Humble et solennel ! Mont qui portes l’aire ! Aube fraîche et claire, Sourire éphémère De l’astre éternel ! N’êtes-vous qu’un livre, Sans fin ni milieu, Où chacun pour vivre Cherche à lire un peu ! Phrase si profonde Qu’en vain on la sonde ! L’oeil y voit un monde, L’âme y trouve un Dieu ! Beau livre qu’achèvent Les coeurs ingénus ; Où les penseurs rêvent Des sens inconnus ; Où ceux que Dieu charge D’un front vaste et large Ecrivent en marge : Nous sommes venus ! Saint livre où la voile Qui flotte en tous lieux, Saint livre où l’étoile Qui rayonne aux yeux, Ne trace, ô mystère ! Qu’un nom solitaire, Qu’un nom sur la terre, Qu’un nom dans les cieux ! Livre salutaire Où le cour s’emplit ! Où tout sage austère Travaille et pâlit ! Dont le sens rebelle Parfois se révèle ! Pythagore épèle Et Moïse lit !
The Dawn is Alight
I The dawn is alight; Thick shadows desist; The dream and the mist Are fled with the night. Each eyelid and rose Half open, half close: All’s waking around, We hark to the sound. The song and the murmur As everything chatters, The smoke and the verdure, Nests, rooftops: all noises! The oaks hear the breeze, The springs hear the waters, And each thing that breathes Will turn into voices. The spirit returns: Loud toy to the child, The hearth again burns, The bow’s on the viol. The world so immense, Wild incontinence, All things recommence Their deeds of erstwhile. By thought or by love We ceaselessly move Towards a great goal, And soar up above. The skiff seeks a mole, The bee a safe hole, The compass a pole; The Truth is my love! II The truth, the profound, Well-tried granite ground My anchor has found Beneath any wave; This world sad and sombre Where dreams beyond number In shadows abound, High vault and low pave! Truth, clear watercourse That never is sullied! The life-giving source, The stalk ever florid! Lamp God will dispose To light every cause, The radiance that goes From matter to spirit! The tree of rough bark, The oak of broad brow, We bend it or break, As strength may allow. In that spreading shade We lean and have laid Ourselves on the trunk, Or lulled on the bough! High torrents that teem! Devouring abysses! The sparkle sublime Jehovah devises! The ray we blaspheme! Eye calm and supreme, By man scarred and scored On the brow of the Lord! III O wonders of earth Whose joyful surprise Resounds in our ears, Bedazzles our eyes! Shores where the wave dies, Woods pruned by the breeze, Mysterious plies Of vague distances! Azure are the veils Of the sea-chasm’s brine: I set free my veils, Winds’ toy, they are gone. On a billow I lean And hear with my spirit A wedding-refrain, The sea sings, I hear it! Azure no less tender Of genial sky, When, keen to discover, O Nature! I try: The spirit may utter The watchword obscure, The word the winds whisper, That’s writ by the star! Unsullied creation! Totality, living! Great girdle, the ocean Of all below heaven! The stars, generation Of God the Lord’s breathing, The flowers, occasion Of God’s honey-reaping! O foliage, fields, O brotherly world! O village church-bells, Sincere and unspoiled! The eyrie high-hurled! Clear daybreak that chills! The star of brief smiles That never grows old! Mere book with no end, Maybe, and no middle, For life we intend To read you, a little! A phrase so profound, Depth no-one can sound, World seen by the pupil, God by the soul found! Fine book that is wrought By innocent hearts, Where pondering starts New vision, new thought: Where those whom God gave A great and broad brow In the margin engrave: ‘We came, here and now!’ Blest book where the veil That everywhere flies, Blest book where the star That shines in our eyes, Finds, wondrous to tell, One name and no more, One name on earth’s ball, One name in the skies! The life-giving page Where all hearts are feeding! Where each austere sage Toils nobly, and pales! Whose meaning rebels And, timely, reveals! Pythagoras spells, And Moses is reading!
Published in Long Poem Magazine 32, Winter 2024

Translation: Copyright © Timothy Adès

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The Lake

Le lac

Alphonse de Lamartine (1790-1869)

Le lac
Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages, Dans la nuit éternelle emportés sans retour, Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges Jeter l'ancre un seul jour ? Ô lac ! l'année à peine a fini sa carrière, Et près des flots chéris qu'elle devait revoir, Regarde ! je viens seul m'asseoir sur cette pierre Où tu la vis s'asseoir ! Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes, Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés, Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes Sur ses pieds adorés. Un soir, t'en souvient-il ? nous voguions en silence ; On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux, Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence Tes flots harmonieux. Tout à coup des accents inconnus à la terre Du rivage charmé frappèrent les échos ; Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère Laissa tomber ces mots : " Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices ! Suspendez votre cours : Laissez-nous savourer les rapides délices Des plus beaux de nos jours ! " Assez de malheureux ici-bas vous implorent, Coulez, coulez pour eux ; Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ; Oubliez les heureux. " Mais je demande en vain quelques moments encore, Le temps m'échappe et fuit ; Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l'aurore Va dissiper la nuit. " Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive, Hâtons-nous, jouissons ! L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive ; Il coule, et nous passons ! " Temps jaloux, se peut-il que ces moments d'ivresse, Où l'amour à longs flots nous verse le bonheur, S'envolent loin de nous de la même vitesse Que les jours de malheur ? Eh quoi ! n'en pourrons-nous fixer au moins la trace ? Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus ! Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface, Ne nous les rendra plus ! Éternité, néant, passé, sombres abîmes, Que faites-vous des jours que vous engloutissez ? Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes Que vous nous ravissez ? Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure ! Vous, que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir, Gardez de cette nuit, gardez, belle nature, Au moins le souvenir ! Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages, Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux, Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages Qui pendent sur tes eaux. Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe, Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés, Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surface De ses molles clartés. Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire, Que les parfums légers de ton air embaumé, Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire, Tout dise : Ils ont aimé !
The Lake
Forever swept to unknown shores away, Propelled through endless night implacably, Shall we not once on time’s primeval sea Drop anchor for a day? O Lake! a year is over. On this stone, By these dear waves she should have viewed again, Before you she was seated. I remain, And sit to-day alone. Just so, beneath these plunging cliffs, you roared, And dashed yourself against their jagged walls; Your wind-blown foam fell then, where now it falls, Here on her feet adored. Recall how we set out, one silent eve: Nothing was heard between the waves and sky, But noise of oars that stroked in harmony The skein your waters weave. Then, suddenly, to tones no mortals hear The echoes on the spellbound shores awoke: The flood gave heed; across the water spoke The voice that I hold dear:- “Time, halt in your flight, and you hours, as a favour, Stop short and stand still in your ways! Since pleasures are fleeting, let’s eagerly savour Our best and most beautiful days! “For the wretches who suffer, run swiftly, you hours; They are many, and this they implore: Put an end to their days, and their care that devours; But the happy, I bid you ignore! “For myself, I may crave a few moments - but no, Time gives me the slip, takes flight: I may say to the night, ‘Go slow, go slow’, But the dawn will scatter the night. “So to Love! Let us love! Seize the wings of the morn, And delight in the scurrying day! For Man has no haven, and Time has no bourn: Time flies, and we vanish away!” Time, jealous Time! In bursts of giddy joy, Love inundates us with great happiness; Do these a faster wayward flight employ Than days of wretchedness? What? Can we not pin down at least a trace? What? Lost entirely? Gone for evermore? Time gave, and Time is minded to efface; And shall not Time restore? Dark gulfs, eternity, the past, the void! You swallow down our days; and what’s their fate? Will you give back what you have once destroyed, Our bliss, divinely great? O Lake! Mute rocks and caves! Dim greenery! Which Time shall spare, or render young again: Natural Beauty! Guard this night for me, Remember, and retain. Both in your tempests let this memory dwell, Fair lake, and in your calm; your slopes that smile, And the black firs and, high above your swell, The louring rocky pile; And in your tremulous and fleeting breeze, Your shore-sound that your further shore relays; And the star silver-browed, whose clarities Give whiteness to your glaze; And moaning wind, and softly sighing reed, Light perfumes, on your balmy zephyrs moved; And everything that’s heard, or seen, or breathed: All this shall say “They loved!”
Poetry Atlas: online [Video in French: https://www.youtube.com/watch?v=Pqq-BjyRqiM]

Translation: Copyright © Timothy Adès

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