A Dream of Christmas

Emmanuel : Un Rêve de Noël

Charles-Marie Leconte de Lisle (1818-94)

Emmanuel : Un Rêve de Noël
…Par les noirs tourbillons de l’ombre j’ai gravi Les trois sphères du ciel où saint Paul fut ravi; Et, de là, regardant, au travers des nuées, Les cimes de la terre en bas diminuées, J’ai vu, par l’œil perçant de cette vision, L’empire d’Augustus et l’antique Sion; Et, dans l’immense nuit de ces temps, nuit épaisse Où s’ensevelissait toute l’humaine espèce Comme un agonisant qui hurle en son linceul, J’ai vu luire un rayon éblouissant, un seul! Et c’était, entre l’âne et le boeuf à leur crèche, Un enfant nouveau-né sur la paille fraîche: Chair neuve, âme sans tache, et, dans leur pureté, Étant comme un arôme et comme une clarté ! Le père à barbe grise et la Mère joyeuse Saluaient dans leur coeur cette aube radieuse, Ce matin d’innocence après la vieille nuit, Apaisant ce qui gronde et charmant ce qui nuit; Cette lumière à peine éclose et d’où ruisselle L’impérissable vie avec chaque étincelle! Et les bergers tendaient la tête pour mieux voir; Et j’ai soudainement ouï par le ciel noir, Tandis que les rumeurs d’en bas semblaient se taire, Une voix dont le son s’épandit sur la terre, Mais douce et calme, et qui disait: Emmanoël! Et l’espace et le temps chantaient: Noël! Noël!
A Dream of Christmas
Through swirling mists and eddying gloom I scaled three spheres of heaven whence St Paul was haled; across the clouds I saw in distant show Earth and her peaks diminished far below: with mystic piercing eye I did behold Augustus’ empery and Sion of old; and in that age’s vast obscurity, thick night, that shrouded all humanity like one in cerements who strains to scream, I saw a single shining, dazzling beam! There at the cattle-stall on fragrant hay by ox and ass a new-born infant lay: new flesh and spotless soul, whose purity seemed an aroma and a clarity! The joyful Mother and the father grey opened their hearts to greet this radiant day, innocent morning after age-long night, that charms the hurtful and assuages spite, the streaming light that never can be dark, imperishable life in every spark! And as the shepherds craned their necks to see, through the black sky I heard it suddenly, while all the murmurs from below were stilled: a sounding voice, by which the earth was filled! Gentle and calm, it said, Emmanuel; and Time and Space sang out: Nowell! Nowell!

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Ambitious Dreams

RÊVES AMBITIEUX

Joséphin Soulary (1815 –-91)

RÊVES AMBITIEUX
    Si j'avais un arpent de sol, mont, val ou plaine, Avec un filet d'eau, torrent, source ou ruisseau, J'y planterais un arbre, olivier, saule ou frêne, J'y bâtirais un toit, chaume, tuile ou roseau.     Sur mon arbre, un doux nid, gramen, duvet ou laine, Retiendrait un chanteur, pinson, merle ou moineau; Sous mon toit, un doux lit, hamac, natte ou berceau, Retiendrait une enfant, blonde, brune ou châtaine.     Je ne veux qu'un arpent; pour le mesurer mieux, Je dirais à l'enfant la plus belle à mes yeux: "Tiens-toi debout devant le soleil qui se lève;     Aussi loin que ton ombre ira sur le gazon, Aussi loin je m'en vais tracer mon horizon." Tout bonheur que la main n'atteint pas n'est qu'un rêve.
Ambitious Dreams
    Had I a plot of land, hill, dale or lea, with any trickle, torrent, spring, or brook, I'd plant an olive, ash, or willow tree, and build a thatched, or tiled, or reeded, nook.     Snug in my tree, in grass or wool or down, a bird would nest, cock-sparrow, finch, or black; snug in my nook, in cradle, cot, or sack, a child would rest, fair, dark, or chestnut-brown.     I ask a plot, no more: which measuring, I'd say: "Stand forth," to one most pretty thing, "against the rising sun, and cast your shade     upon the greensward. Where that shade may end, so far shall I my boundaries extend." Joys that we cannot reach are dreams that fade.
[video width="720" height="480" m4v="https://www.timothyades.com/wp-content/uploads/2021/05/AdesXuZhimoRecital.m4v"][/video] The Sixth Cambridge Xu Zhimo Poetry and Art Festival

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Art

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Art

THÉOPHILE GAUTIER (1811-72)

Oui, l’oeuvre sort plus belle D’une forme au travail Rebelle, Vers, marbre, onyx, émail. Point de contraintes fausses! Mais que pour marcher droit Tu chausses, Muse, un cothurne étroit. Fi du rhythme commode, Comme un soulier trop grand, Du mode Que tout pied quitte et prend! Statuaire, repousse L’argile que pétrit Le pouce Quand flotte ailleurs l’esprit. Lutte avec le carrare, Avec le paros dur Et rare, Gardiens du contour pur; Emprunte à Syracuse Son bronze où fermement S’accuse Le trait fier et charmant; D’une main délicate Poursuis dans un filon D’agate Le profil d’Apollon. Peintre, fuis l’aquarelle, Et fixe la couleur Trop frêle Au four de l’émailleur. Fais les sirènes bleues, Tordant de cent façons Leurs queues, Les monstres des blasons; Dans son nimbe trilobe La Vierge et son Jésus, Le globe Avec la croix dessus. Tout passe. — L’art robuste Seul a l’éternité, Le buste Survit à la cité, Et la médaille austère Que trouve un laboureur Sous terre Révèle un empereur. Les dieux eux–mêmes meurent, Mais les vers souverains Demeurent Plus forts que les airains. Sculpte, lime, cisèle; Que ton rêve flottant Se scelle Dans le bloc résistant!
Art
Yes, a work comes out better that’s hewn and won from matter perverse: enamel, onyx, marble, verse. For false rules we’ve no use! But to go straight as an arrow, Muse, your shoe needs to be narrow. Down with commodious rhythm that’s like an outsize boot, whose fathom fits and fails every foot! Modeller, shun, for it slips at your finger–tips, the clay, should thoughts go astray; grapple with travertine, or rarer parian; guard pure line of contour with hard carrara; borrow from Syracuse her bronze, standing firm to accuse proper pride and charm; make dextrously, chase in a perfect nugget of agate Phoebus’s beaked face. Painter, eschew the gouache: fix the frail timbres at fire–flash in the enameller’s embers. Make mermaids and dolphins, twist in fivescore fashions their tailfins, blue monsters of blazons; haloed in triple lobe, limn Mary and her Son; the globe, and His Cross thereon. All passes. — Robust art lives for ever; the bust is the city’s survivor. The dull medal, found by humble labourer beneath ground, reveals an emperor. Even gods perish, yet peerless stanzas flourish, stronger than bronzes. Sculpt, chisel, rasp: let the precisian block grasp your dancing vision!

Translation: Copyright © Timothy Adès

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The Hippopotamus

L’Hippopotame:

THÉOPHILE GAUTIER (1811-72)

A poem about a Rhinoceros...
L’Hippopotame:
L’hippopotame au large ventre Habite aux jungles de Java, Où grondent, au fond de chaque antre, Plus de monstres qu’on n’en rêva. Le boa se déroule et siffle, Le tigre fait son hurlement, Le bufle en colère renifle, Lui dort ou paît tranquillement. Il ne craint ni kriss ni zagaies, Il regarde l’homme sans fuir, Et rit des balles des cipayes Qui rebondissent sur son cuir. Je suis comme l’hippopotame: De ma conviction couvert, Forte armure que rien n’entame, Je vais sans peur par le désert.
The Hippopotamus
The sturdy Hippopotamus inhabits jungles Javanese where snarl in caverns bottomless undreamable monstrosities. The boa hisses and unscrews; snuffles convulse the buffalo; the tiger caterwauls. He chews, or slumbers, tranquillissimo. He fears not kris nor assegai, he looks at man and stands his ground; he laughs, when shots from the sepoy spatter his leather and rebound. The hippopotamus and I have an impenetrable hide. In armour-plate of certainty I roam the plains with dauntless stride.
Published in In the Company of Poets (Hearing Eye)

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Preface

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Preface

THÉOPHILE GAUTIER (1811-72)

During the imperial strife Goethe, to grim cannon’s noise, wrote his Westerly Divan, art’s oasis, breath of life: chose the Bulbul, shunned the Swan, wore the scent of sandalwood, and in oriental voice penned the love-song of Hudhud. As Goethe, propped on his divan at Weimar, totally withdrawn, plucked petals from Hafiz’s rose, so I, despite the hurricane that lashed the panes that I drew close, made my Enamels and Cameos.
Preface
Pendant les guerres de l’empire, Goethe, au bruit du canon brutal, Fit le Divan occidental, Fraîche oasis où l’art respire. Pour Nisami quittant Shakspeare, Il se parfuma de santal, Et sur un mètre oriental Nota le chant qu’Hudhud soupire. Comme Goethe sur son divan A Weimar s’isolait des choses Et d’Hafiz effeuillait les roses, Sans prendre garde à l’ouragan Qui fouettait mes vitres fermées, Moi, j’ai fait Émaux et Camées.

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Chinoiserie

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Chinoiserie

THÉOPHILE GAUTIER (1811-72)

Ce n’est pas vous, non, madame, que j’aime, Ni vous non plus, Juliette, ni vous, Ophélia, ni Béatrix, ni même Laure la blonde, avec ses grands yeux doux. Celle que j’aime, à présent, est en Chine ; Elle demeure, avec ses vieux parents, Dans une tour de porcelaine fine, Au fleuve jaune, où sont les cormorans ; Elle a des yeux retroussés vers les tempes, Un pied petit, à tenir dans la main, Le teint plus clair que le cuivre des lampes, Les ongles longs et rougis de carmin ; Par son treillis elle passe sa tête, Que l’hirondelle, en volant, vient toucher, Et, chaque soir, aussi bien qu’un poète, Chante le saule et la fleur du pêcher.
Chinoiserie
Madam, you’re not my love, and nor are you, Beatrice, nor you, Juliette, nor you, Ophelia; nor yet, with her great, soft eyes, golden Laura. In China at this very hour, seeing her parents, is my lover, in a fine porcelain china tower, with cormorants, on the Yellow River. Eyes at the temples gathered in; long finger-nails, emblazoned gules; paler than lamps of brass, her skin; feet, in my safe hands, minuscule. Out through the lattice comes her face, brushed on the wing by veering swallow. Each evening she with poet’s grace sings the peach-blossom and the willow.

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Symphony in White Major

Symphonie en blanc majeur

THÉOPHILE GAUTIER (1811-72)

Symphonie en blanc majeur
De leur col blanc courbant les lignes, On voit dans les contes du Nord, Sur le vieux Rhin, des femmes-cygnes Nager en chantant près du bord, Ou, suspendant à quelque branche Le plumage qui les revêt, Faire luire leur peau plus blanche Que la neige de leur duvet. De ces femmes il en est une, Qui chez nous descend quelquefois, Blanche comme le clair de lune Sur les glaciers dans les cieux froids ; Conviant la vue enivrée De sa boréale fraîcheur A des régals de chair nacrée, A des débauches de blancheur ! Son sein, neige moulée en globe, Contre les camélias blancs Et le blanc satin de sa robe Soutient des combats insolents. Dans ces grandes batailles blanches, Satins et fleurs ont le dessous, Et, sans demander leurs revanches, Jaunissent comme des jaloux. Sur les blancheurs de son épaule, Paros au grain éblouissant, Comme dans une nuit du pôle, Un givre invisible descend. De quel mica de neige vierge, De quelle moelle de roseau, De quelle hostie et de quel cierge A-t-on fait le blanc de sa peau ? A-t-on pris la goutte lactée Tachant l'azur du ciel d'hiver, Le lis à la pulpe argentée, La blanche écume de la mer ; Le marbre blanc, chair froide et pâle, Où vivent les divinités ; L'argent mat, la laiteuse opale Qu'irisent de vagues clartés ; L'ivoire, où ses mains ont des ailes, Et, comme des papillons blancs, Sur la pointe des notes frêles Suspendent leurs baisers tremblants ; L'hermine vierge de souillure, Qui pour abriter leurs frissons, Ouate de sa blanche fourrure Les épaules et les blasons ; Le vif-argent aux fleurs fantasques Dont les vitraux sont ramagés ; Les blanches dentelles des vasques, Pleurs de l'ondine en l'air figés ; L'aubépine de mai qui plie Sous les blancs frimas de ses fleurs ; L'albâtre où la mélancolie Aime à retrouver ses pâleurs ; Le duvet blanc de la colombe, Neigeant sur les toits du manoir, Et la stalactite qui tombe, Larme blanche de l'antre noir ? Des Groenlands et des Norvèges Vient-elle avec Séraphita ? Est-ce la Madone des neiges, Un sphinx blanc que l'hiver sculpta, Sphinx enterré par l'avalanche, Gardien des glaciers étoilés, Et qui, sous sa poitrine blanche, Cache de blancs secrets gelés ? Sous la glace où calme il repose, Oh ! qui pourra fondre ce coeur ! Oh ! qui pourra mettre un ton rose Dans cette implacable blancheur !
Symphony in White Major
CURVING their white necks’ sinuous line, we see in Northern fairy-lore swan-women on the storied Rhine sing as they swim beside the shore. We see them doff their plumage bright, hang on some branch their feathered gown, so that their skin shines forth, more white yet than the snow of their own down. Of these swan-women there is one who steers to us her odysseys, and she is white as gleaming moon on glaciers under frozen skies. Her beauty boreal, frigid-fresh, leads the besotted reeling mind to banquets of pearl-tinted flesh, orgies of whiteness unconfined! Her breast, snow moulded in a globe, challenges all the white camellias, taunts the white satin of her robe, enters on duels contumelious. In all these whiteness-jousts hard-fought, the only victor is that bosom: jealous, though no revenge is sought, yellows the satin, and the blossom. On her shoulder dazzling white, Parian marble sparkle-grained, as upon a polar night, frosts invisible descend. Of what snowy granule pure, of what marrow of a reed, host or candle of the choir, is her body’s whiteness made? Did they take the milky sap spilt on winter sky’s blue vault, or the silver lily’s pap, or the sea’s white spume of salt; pallid flesh of chill white marble, seat of live divinities; shineless silver, milky opal that mild glimmers iridise; ivory, when her hands take wing, and like two white butterflies hang their kisses shuddering on frail tips of melodies; ermine that, unsullied, pure, lest they shiver, shields and warms, swathes with whiteness of its fur high-born shoulders, coats-of-arms; quicksilver in mazy pattern, blooms on hallowed glass; the sprite, weeping, at the pools of fountains, tears in sharp air lacy-white; thorn-tree bowed by all its flowers, white with hoar-frost of the may; alabaster that endowers, prinks the pallors of dismay; white down snowing from the dove, falling on the manor’s eaves; stalactites dropt from above, a white tear in a black cave? From Norway’s fjords and Greenland’s floes the Seraphita does she bring? She, the Madonna of the snows, white sphinx of winter’s fashioning, a sphinx by avalanche interred, guarding the glacier seas star-studded, with secret, white, and frozen word safe in her own white breast embedded? Who shall melt that heart’s repose, thaw its ice-bound reverie, introduce a tint of rose in that whiteness sans merci?
Seraphita: the poet’s white cat. Also the title of a Balzac novel he admired, set in Norway.

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Proposition to George Sand

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Proposition to George Sand

ALFRED DE MUSSET (1810-57)

Quand je mets à vos pieds un éternel hommage Voulez-vous qu’un instant je me change de visage? Vous avez capturé les sentiments d’un cœur Que, pour vous adorer, forma le Créateur. Je vous chéris, Amour, et ma plume en délire Couche sur le papier ce que je n’ose vous dire... Avec soin, de mes vers, lisez les premiers mots Vous saurez quel remède apporter à mes maux. Elle répond : Cette insigne faveur, que notre cœur réclame, Nuit à ma renommée et répugne à mon âme.
Proposition to George Sand
When I lay deathless homage at your feet, Will you desire my face to change one whit? You have enthralled this heart, which powers above Have formed to love you, and that you may love Me in return, my dear one! Can my pen Lie, writing what my lips dare not say plain? With care, peruse the leading words I send: You shall discover how my woes may end. Her Reply: This signal favour shames and gives offence. Night yields to day: my loving heart consents!

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On His Grave

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On His Grave

ALFRED DE MUSSET (1810-57)

Mes chers amis quand je mourrai Plantez un saule au cimetière J’aime son feuillage éploré La pâleur m’en est douce et chère Et son ombre sera légère À la terre où je dormirai.
On His Grave
When I at last to rest am laid, My friends, come plant a willow tree, So sweet, so pale, so dear to me. I love the way its branches weep, And it shall cast a gentle shade Upon the earth where I shall sleep.

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Butterflies

Les Papillons

Gérard de Nerval (1808-55)

Les Papillons
I De toutes les belles choses Qui nous manquent en hiver, Qu’aimez–vous mieux? — Mois, les roses; — Moi, l’aspect d’un beau pré vert; — Moi, la moisson blondissante; Chevelure des sillons; — Moi, le rossignol qui chante; — Et moi, les beaux papillons! Le papillon, fleur sans tige, Qui voltige, Que l’on cueille en un réseau; Dans la nature infinie, Harmonie, Entre la plante et l’oiseau!… Quand revient l’été superbe, Je m’en vais au bois tout seul: Je m’étends dans la grande herbe, Perdu dans ce vert linceul. Sur ma tête renversée, Là, chacun d’eux à son tour, Passe comme une pensée De poésie ou d’amour! Voici le papillon faune, Noir et jaune; Voici le mars azuré, Agitant des étincelles Sur ses ailes D’un velours riche et moiré. Voici le vulcain rapide, Qui vole comme l’oiseau: Son aile noire et splendide Porte un grand ruban ponceau. Dieux! le soufré, dans l’espace, Comme un éclair a relui… Mais le joyeux nacré passe, Et je ne vois plus que lui! II Comme un éventail de soie, Il déploie Son manteau semé d’argent; Et sa robe bigarrée Est dorée D’un or verdâtre et changeant. Voici le machaon–zèbre, De fauve et de noir rayé; Le deuil, en habit funèbre, Et le miroir bleu strié; Voici l’argus, feuille–morte, Le morio, le grand–bleu, Et la paon–de–jour qui porte Sur chaque aile un œil de feu! * Mais le soir brunit nos plaines; Les phalènes Prennent leur essor bruyant, Et les sphinx aux couleurs sombres, Dans les ombres Voltigent en tournoyant. C’est le grand’paon à l’œil rose Dessiné sur un fond gris, Qui ne vole qu’à nuit close, Comme les chauves–souris; Le bombice du troëne, Rayé de jaune et de vert, Et le papillon du chêne Qui ne meurt pas en hiver! Voici le sphinx à la tête De squelette, Peinte en blanc sur un fond noir, Que le villageois redoute, Sur la route, De voir voltiger le soir. Je hais aussi les phalènes, Sombres, hôtes de la nuit, Qui voltigent dans nos plaines De sept heures à minuit; Mais vous, papillons que j’aime, Légers papillons du jour, Tout en vous est un emblème De poésie et d’amour! III Malheur, papillons que j’aime, Doux emblème, À vous pour votre beauté!… Un doigt, de votre corsage, Au passage, Froisse, hélas! le velouté!… Une toute jeune fille, Au cœur tendre, au doux souris, Perçant vos cœurs d’une aiguille, Vous contemple, l’œil surpris: Et vos pattes sont coupées Par l’ongle blanc qui les mord, Et vos antennes crispées Dans les douleurs de la mort!…
Butterflies
I Of all the fine treasure That winter forecloses, What gives the most pleasure? — For me, I say roses; — For me, fair green meadows; — The ripening harvest, Blonde tress of the furrows; — Nightingale’s melodies; — For me, brilliant butterflies! Butterfly, untethered flower, Leaping and cavorting, yet Captured in a cruel net. Nature’s world, infinity: Bud and bird in harmony! When proud summer comes to pass, I go lonely to the wood. There I lie in tallest grass, Lose myself in the green shroud: Watch above my upturned head Every one of them go by. Thoughts of love, of poetry! See the Monarch butterfly: Black and gold his livery… Purple Emperor in flight, Sparks of light Scurrying On his rich, shot–velvet wing. Red Admiral, he can speed Like a bird: Black and splendid is his wing, Poppy–ribbons blazoning. Brimstone Yellow flashes past, Lightning–fast; Pearl or brown Fritillary, All my field of sight is he: II He spreads like silken fan His mantle silver–sewn: With shifting gold And emerald He gilds his motley gown. Zebra stripe of Swallowtail, Black and tawny–yellow hue; Marbled White, black–draped and pale, Chequered Skipper, streaked with blue; Argus, dead leaf; Camberwell Beauty; Large Blue — rare, so rare; And the Peacock, brandishing, On each wing, Eye of fire! * Brown our fields, at fall of night. See the Moths’ Noisy flight: First a dusky Sphinx, in shade, Twists and turns his escapade. Here comes the Great Peacock Moth, Pink eyes on a grey back–cloth: Like the bats, the flittermice, It’s at nightfall that he flies. Privet Hawk–Moth, funny fellow, Stripes on grub of green and yellow; While the Oak Procession Moth Laughs at winter, cheating death. There’s a Sphinx displays a skull, White on black, piratical: In the byways he appals Villagers, as evening falls. Moths, grim guests of night, I hate: Which in our fields gyrate From seven till too late. But, my precious Butterflies, Fluttering in daylight skies, You are all a symbol of Poetry, a pledge of love. III Woe, my precious butterflies, Who symbolise: Woe betide your loveliness. Passing finger comes to bruise, To abuse Your velvet dress. Some young girl, Tender–hearted, smiling, sweet, Looks in mild surprise on you, Stabs your heart with needle through; And your feet She’ll curtail, Nip with pale Finger–nail, Your antennæ crimp and curl, With a pain that’s terminal!

Translation: Copyright © Timothy Adès

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