Vintage

Vendanges

Paul Verlaine (1844-96)

Vendanges
Les choses qui chantent dans la tête Alors que la mémoire est absente, Écoutez, c’est notre sang qui chante... O musique lointaine et discrète! Écoutez ! c’est notre sang qui pleure Alors que notre âme s’est enfuie, D’une voix jusqu’alors inouïe Et qui va se taire tout à l’heure. Frère du sang de la vigne rose, Frère du vin de la veine noire, O vin, ô sang, c’est l’apothéose! Chantez, pleurez ! Chassez la mémoire Et chassez l’âme, et jusqu’aux ténèbres Magnétisez nos pauvres vertèbres.
Vintage
What sings in the head In times out of mind? The song of our blood, Far-off and refined: Our blood shedding tears, Our soul in its flight: Voice fresh in our ears, That soon will be quiet. Blood’s twin, the red vine, Wine’s twin, the black vein: Blood, wine, up to heaven! Songs, tears! Banish mind And soul: come, enliven Our bones, to dusk’s haven.
Published in Cantalao no:1.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Tears fall in my heart

Il pleure dans mon cœur

Paul Verlaine (1844-96)

Il pleure dans mon cœur
Il pleure dans mon cœur Comme il pleut sur la ville; Quelle est cette langueur Qui pénètre mon cœur? Ô bruit doux de la pluie Par terre et sur les toits! Pour un cœur qui s’ennuie Ô le bruit de la pluie! Il pleure sans raison Dans ce cœur qui s’écœure. Quoi! nulle trahison? … Ce deuil est sans raison. C’est bien la pire peine De ne savoir pourquoi Sans amour et sans haine, Mon cœur a tant de peine.
Tears fall in my heart
Tears fall in my heart Like rain on the town; What lassitude hurts And pierces my heart? Sweet sound of the rain On the roofs and the ground! For a heart in dull pain The sound of the rain! Tears fall without reason Distressing my heart. What! Is there not treason?... This grief has no reason. Of pain the worst part Is not knowing why Without love or hate Such pain in my heart.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Parisian Sketch

Croquis parisien

Paul Verlaine (1844-96)

Croquis parisien
La lune plaquait ses teintes de zinc Par angles obtus. Des bouts de fumée en forme de cinq Sortaient drus et noirs des hauts toits pointus. Le ciel était gris. La bise pleurait Ainsi qu'un basson. Au loin, un matou frileux et discret Miaulait d'étrange et grêle façon. Moi, j'allais, rêvant du divin Platon Et de Phidias, Et de Salamine et de Marathon, Sous l'oeil clignotant des bleus becs de gaz.
Parisian Sketch
The sky was grey. The bitter north wind wept Like a bassoon, And thick black smoke-plumes twisted as they leapt From lofty pointed roofs towards the moon, Which spread a plating, blunt and angular, In dull zinc hues. A cat, less warm than watchful, somewhere far Uttered its eerie, high-pitched mews. I walked, I dreamed of godlike Phidias And Plato too, I dreamed of Marathon and Salamis… The gas-lamps’ eyes were watching, winking, blue.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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On the Grass

Sur l’herbe (de : Fêtes Galantes)

Paul Verlaine (1844-96)

Sur l’herbe (de : Fêtes Galantes)
L'abbé divague. — Et toi, marquis Tu mets de travers ta perruque. — Ce vieux vin de Chypre est exquis Moins, Camargo, que votre nuque. — Ma flamme... — Do, mi, sol, la, si. — L'abbé, ta noirceur se dévoile. — Que je meure, mesdames, si Je ne vous décroche une étoile — Je voudrais être petit chien ! — Embrassons nos bergères, l'une Après l'autre. — Messieurs ! eh bien ? — Do, mi, sol. — Hé ! bonsoir, la Lune !
On the Grass
The Dean talks rot. - And, Duke, old boy, Your wig has slipped a long way over. - This vintage Cyprus wine’s a joy, More so your lovely neck, Pavlova. - My darling!... - Doh, mi, so, la, ti. - Dear Dean, we all know you are bestial. - I swear, dear ladies, faithfully To bring you golden fire celestial. - I’d like to be a little pup. - Let’s kiss our milkmaids very soon, All in a row. - What, chaps? Shape up! - Doh, mi, so. - Hey, good evening, moon!
François Le Roux sang it on vinyl, 1984, on his Verlaine LP.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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The Sea

La mer

Paul Verlaine (1844-96)

La mer
La mer est plus belle Que les cathédrales, Nourrice fidèle, Berceuse de râles, La mer sur qui prie La Vierge Marie ! Elle a tous les dons Terribles et doux. J'entends ses pardons Gronder ses courroux. Cette immensité N'a rien d'entêté. Oh ! si patiente, Même quand méchante ! Un souffle ami hante La vague, et nous chante : " Vous sans espérance, Mourez sans souffrance ! " Et puis sous les cieux Qui s'y rient plus clairs, Elle a des airs bleus, Roses, gris et verts... Plus belle que tous, Meilleure que nous!
The Sea
The sea has more beauty Than all our cathedrals: Our wet-nurse on duty, Our cradler of rattles: The sea, oratory Of God’s mother Mary! She has all the guerdons, The fearsome, the good. I’ve heard how she pardons, Rebukes her foul mood. In all the great ocean, No ossification! And oh, how forgiving, Despite misbehaving! A kindly breeze haunts The billow, and chants “All ye who lose heart, Grieve not, but depart!” And under the skies That laugh so serene She takes on a guise Pink, blue, grey, or green, She is the most fair. We cannot compare!

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Walcourt

Walcourt

Paul Verlaine (1844-96)

Walcourt
Briques et tuiles, Ô les charmants Petits asiles Pour les amants ! Houblons et vignes, Feuilles et fleurs, Tentes insignes Des francs buveurs ! Guinguettes claires, Bières, clameurs, Servantes chères À tous fumeurs ! Gares prochaines, Gais chemins grands… Quelles aubaines, Bons juifs-errants !
Walcourt
Bricks and tiles, Sweet retreats, O what treats For philophiles! Hops and vines, Leaves and flowers, Tavern-signs, Happy hours! Bills of fare, Shouts for ale, Lovelies, where We inhale! Ready trains, Smiling lanes, Happy days For tearaways!
Romances sans paroles (Paysages Belges), 1874

Translation: Copyright © Timothy Adès

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ANTONY AND CLEOPATRA

Antoine et Cléopâtre

José-Maria de Hérédia (1842-1905)

Antoine et Cléopâtre
Tous deux ils regardaient, de la haute terrasse, L'Égypte s'endormir sous un ciel étouffant Et le Fleuve, à travers le Delta noir qu'il fend, Vers Bubaste ou Saïs rouler son onde grasse. Et le Romain sentait sous la lourde cuirasse, Soldat captif berçant le sommeil d'un enfant, Ployer et défaillir sur son coeur triomphant Le corps voluptueux que son étreinte embrasse. Tournant sa tête pâle entre ses cheveux bruns Vers celui qu'enivraient d'invincibles parfums, Elle tendit sa bouche et ses prunelles claires ; Et sur elle courbé, l'ardent Imperator Vit dans ses larges yeux étoilés de points d'or Toute une mer immense où fuyaient des galères.
ANTONY AND CLEOPATRA
Together from the terrace they could see Egypt bed down beneath a sultry sky; through the black delta, fatly, massively, to Saïs or Bubastis, Nile rolled by. A captured soldier, like a sleeping child the Roman held that lovely form, and felt, through his thick breastplate, the enchantress melt on his triumphant heart, and, pliant, yield. Turning her pale head that the brown hair framed, she offered lips and bright eyes to the one unconquerable fragrances enflamed: hunched over her, the ardent prince discerned, in those great eyes where golden star-points burned, a whole wide sea, and warships on the run.
Published on Poetry Atlas website

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The Coral Reef

Le récif de corail

José-Maria de Hérédia (1842-1905)

Le récif de corail
Le soleil sous la mer, mystérieuse aurore, Éclaire la forêt des coraux abyssins Qui mêle, aux profondeurs de ses tièdes bassins, La bête épanouie et la vivante flore. Et tout ce que le sel ou l'iode colore, Mousse, algue chevelue, anémones, oursins, Couvre de pourpre sombre, en somptueux dessins, Le fond vermiculé du pâle madrépore. De sa splendide écaille éteignant les émaux, Un grand poisson navigue à travers les rameaux ; Dans l'ombre transparente indolemment il rôde ; Et, brusquement, d'un coup de sa nageoire en feu Il fait, par le cristal morne, immobile et bleu, Courir un frisson d'or, de nacre et d'émeraude.
The Coral Reef
Sun under sea, the mysterious aurora, lights up abysses and forests of corals mingling in depths of their warm-water basins creatures resplendent, ebullient flora. All that the salt or the iodine colours, moss, hairy seaweed, anemones, urchins, covers, in sumptuous designs of deep purple, beds of the madrepore’s worm-patterned pallor. Quenching his scales that are fiery enamels comes a big fish moving clean through the branches, lazily browses in shady transparence: suddenly whisking his fin pyrotechnic, makes the blue motionless lack-lustre crystal thrill to the pearl-gleam, the gold, the smaragdine.
https://www.youtube.com/watch?v=_F08Lg7_wlE

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Sailor's Wind

Brise Marine

Stéphane Mallarmé (1842-98)

Translated without using letter E: a lipogram
Brise Marine
La chair est triste, hélas! et j’ai lu tous les livres, Fuir! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres D’être parmi l’écume inconnue et les cieux! Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe O nuits! ni la clarté déserte de ma lampe Sur le vide papier que la blancheur défend Et ni la jeune femme allaitant son’enfant. Je partirai! Steamer balançant ta mâture, Lève l’ancre pour une exotique nature! Un Ennui, désolé par les cruels espoirs, Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs! Et, peut-être, les mâts, invitant les orages Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles ilôts … Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots!
Sailor's Wind
Limbs flag and fail; j’ai lu all books of words. To fly away! I think of soaring birds In sky unknown, and spray, mad-drunk with flight. No arbours, mirror’d back from orbs of sight, Can stay my soul from plunging totally, O nights! nor lamplight’s arid clarity On my blank writing-pad’s forbidding wall; Nor a young woman with a sucking doll. I go! You throbbing ship with masts that sway, Up anchor, and to magick lands away! Vain longings haunt us; harsh monotony Still trusts in waving chiffon’s last goodby; And masts that summon storms may soon bow down To roaring winds, by ruin’d hulks that drown, Lost, with no masts, nor islands blossoming … But hark, my soul! What songs our sailors sing!

Translation: Copyright © Timothy Adès

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Épiphanie

Epiphany

José-Maria de Hérédia (1842-1905)

Epiphany
Donc, Balthazar, Melchior et Gaspar, les Rois Mages, Chargés de nefs d’argent, de vermeil et d’émaux Et suivis d’un très long cortège de chameaux, S’avancent, tels qu’ils sont dans les vieilles images. De l’Orient, lointain, ils portent leurs hommages Aux pieds du fils de Dieu, nés pour guérir les maux Que souffrent ici-bas l’homme et les animaux ; Un page noir soutient leurs robes à ramages. Sur le seuil de l’étable où veille saint Joseph, Ils ôtent humblement la couronne du chef Pour saluer l’Enfant qui rit et les admire. C’est ainsi qu’autrefois, sous Auguste César, Sont venus, présentant l’or, l’encens et la myrrhe, Les Rois Mages Gaspar, Melchior et Balthazar.
Épiphanie
Balthazar, Melchior, Gaspar, the Three Kings, Loaded with silver, scarlets and enamels, And followed by a long parade of camels, Draw near, as in great art’s imaginings. From eastern lands afar the trio brings Homage to God’s Son, born to heal all ills Endured on earth by men and animals… Intricate robes! held high by underlings. St Joseph keeps his vigil at the byre: They humbly doff their crowns, their heads are bare, They greet the laughing and admiring Child. So, when in times long past Augustus ruled, There came with myrrh and frankincense and gold Three Kings called Gaspar, Melchior, Balthazar.

Translation: Copyright © Timothy Adès

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