Il neige
Charles Oulmont (1883-1984)
Il neige
Il neige, il neige du chagrin…
L’on dirait d’un grand rideau gris.
Penses-tu donc la vie si longue
Pour ne pas éloigner cette ombre ?...
L’ombre augmente avecque le soir
Elle se confond dans la nuit.
Le gris n’est plus gris, mais tout noir,
Si noir qu’on ne le sait plus gris …
Et pourtant, il est là, tout près,
Il guette tes soupirs, tes larmes,
Il se réjouit de ta peine.
Il neige, il neige du chagrin…
Crois-m’en, ne le laisse pas vivre :
De sa vie naîtrait ta mort.
Cultive le rose ou le bleu,
Clarté, sourire, amour, soleil.
Ce que déteste le chagrin,
Aime-le toujours plus et plus :
Sournois, lâche, il reculera :
Il aura peur de cette joie
Et tu chanteras devant lui
Sans le craindre le moins du monde,
Plus de cœur en berne jamais :
Du chagrin, la neige a fondu.It’s Snowing
It’s snowing, snowing sorrow.
You’d say, a great grey curtain.
Do you then think life’s too long
Not to repel this shadow?
The shadow grows with evening,
It blends into the night,
Not grey now, but quite black, so black
It cannot pass for grey.
And yet it’s there, so close,
Watching your sighs and tears,
Rejoicing in your pain,
It’s snowing, snowing sorrow.
Trust me, don’t let it live!
Its life would spawn your death.
Nurture the rose, or blue
Brightness, the smile, love, sun.
Love that which sorrow loathes,
For ever, more and more:
Sullen and cowardly, it will
Shrink back, scared of this joy.
You’ll sing in sorrow’s face,
With the least fear in the world.
No heart at half-mast now!
And sorrow’s snows have thawed.Verlaine is in prison, in Mons (at first, in Brussels), for shooting Rimbaud in the wrist.
Set to music by Dutilleux
Translation: Copyright © Timothy Adès